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La Havane, vraie de vraie

l’éternelle

Incroyable peuple cubain. Pandémie, interdits, pénurie…
Rien n’y fait, son inventivité, sa fierté et son entrain surmontent tous les obstacles. Illustration avec une promenade au fil des rues de La Havane.

D’un côté, il y a la carte postale. Elle tient bon. Vieilles guimbardes américaines des fifties, Chevrolet, Pontiac, Cadillac, repeintes aux couleurs des tropiques, rouge cerise, vert amande, bleu lagon… La portière grince mais le gros diésel Toyota désormais logé sous le capot monte la gamme des pétarades avec brio. La Havane compterait 120 000 de ces bijoux, tous devenus taxi chic, 30 euros l’heure de balade, cascade de suppléments réclamés au final et vidéo souvenir pour la vie. Autrement, on hèlera la bicyclette-taxi dotée d’une plateforme arrière, ou sa version électrique. Diviser le prix réclamé par deux et laisser venir.

L’argent local, le peso, subit une inflation démentielle, 70% dit Granma, le quotidien du Parti communiste, 700% ronchonne la rue. Alors, place au système D comme dollar, E comme euro. Le cours officiel de la devise européenne, celui de la banque, est de 26 pesos. Dans la rue ou mieux, chez des amis, on en donne 90, voire 100. Du coup, l’excellent daiquiri concocté au Floridita, le repaire du soiffard Hemingway, est affiché 250 pesos, 10 euros quand on est royal au bar, 2,50 euros si on la joue Havanais pur jus. Idem pour la langouste, la chemise quatre poches ou la boite de cigares. Sauf militantisme béat envers les héritiers de Fidel, l’affaire est vite entendue. On embarquera donc avec une liasse d’euros qu’on changera au fur et à mesure du séjour contre des pesos crades et chiffonnés, garants d’un budget vacances riquiqui.

Explication. Sous embargo américain, Cuba a besoin d’euros et de dollars, pour payer cash ses fournisseurs étrangers, pétrole, engrais, pièces détachées, tissus, etc. Pour ce faire, deux solutions : capter le portefeuille des visiteurs ; et assécher celui des Cubains, alimenté par les cousins de Miami ou le marché noir local. Posséder des devises permet en effet de fréquenter les magasins d’Etat qui disposent de tout, vins, leggins dernier cri, téléphones, réfrigérateur, crèmes de beauté… La classe, mais accessible uniquement en dollars.

Baiser volé, amours égarées

La visite classique de La Havane, cathédrale, palais historiques, musées à la gloire de la Révolution, fabriques de cigares, galeries d’art et bars se fera guide touristique à la main, ils en tiennent la chronique attentive.

Toutefois, cette ville incroyablement belle se respire d’abord au niveau de sa rue. Vibrante, sensuelle, rythmée en permanence. Salsa, rumba, boléro, mambo chantent l’hymne de la rencontre, du baiser volé, des amours égarées…, autant de musiques jaillies à mille Watts depuis une cour délabrée, un appartement grand ouvert, une ruine mangée par le lierre et les bougainvillées. Personne ne parle de pauvreté le long des ruelles tendues de façades décaties. On y fait la queue avec résignation, à tu et à toi avec ses voisins de patience, pour le pain, les médicaments, le coiffeur, les fringues, un bâton de rouge à lèvres… Bref, pour tout. Pas d’urgence, ce n’est qu’une question de temps, les tropiques savent l’habiller de sérénité.

Pas besoin de se connaitre pour saluer les dames d’un « Amor » ou « Corazon », mon amour, mon cœur. Aux messieurs, on sert du « Companero », compagnon. Vous voici en un clin d’œil élevé au rang de Maîtresse des Barbudos, de Héros de la Révolution, pétoire en bandoulière, Cohiba au bec. Les collégiens trainent la savate, jean déchiré et t-shirt à la gloire de Drake. Seuls les touristes bombent le torse sous le portrait du Che qui tapisse les boutiques de souvenirs. Les jeunettes, elles, déambulent en grappe, short slim, pomponnées de frais, balançant leur féminité avec autant de fierté que d’espièglerie. Main dans la main, les amoureux roucoulent le long du Malecon, la longue promenade des bords d’Atlantique protégée par un muret que certaines vagues éclaboussent, les filles rigolent en sautillant, les beaux gosses jouent les braves en défiant le large. Interdiction d’y aller, se contenter d’en rêver.

Filles que l’école n’a pas retenues

Changement de décor, 20 mètres en deçà, rue San Lazaro. Le long de cette travée cabossée, le discours officiel indiffère, les amours joyeuses laissent de marbre et l’embargo ne touche personne. Même pas mal. Ses habitants vivent au ras d’une rue délabrée par l’indifférence. De chaque côté, les majestueuses maisons coloniales tombent en ruines. Portes et fenêtres sont calfeutrées avec des feuilles plastique déchirées, des planches mal ajustées. Les patios débordent de gravats, d’ordures, les graffitis tapissent les couloirs sombres. Les gens ? Leur peau devient plus sombre dans ce ghetto, squat géant d’un quartier en quête de démolition. Les lascars travaillent les biscotos, gamins habillés de rien, déchirés de partout, chiens affalés, chats rasant les murs, filles que l’école n’a pas retenues. Quelques boutiques miniatures forcent la vie. Clopes, flasque de mauvais rhum, savon. Une enseigne rouge clignote, un bar où siffler sa bière au goulot, histoire d’étancher l’absence et le silence.

Potion magique

Les peu regardant prétendent que le régime castriste ne survit que par les dociles, les dos courbés et les regards soumis. Tout faux. Contrairement à ce qui se passe dans d’autres pays conquis par la faucille et le marteau, Cuba déborde de tempérament. Et que j’engueule les camarades du Parti, et que je hurle d’une fenêtre à l’autre, et que tu me prêtes ta caisse, je te file ma perceuse, hep taxi, baisse tes prix, tu charries !

Cela dit, ne rêvons pas. Le dénuement, l’absence récurrente d’un essentiel, le beurre, les pneus, les ampoules, la ficelle, l’eau de Javel, les privations que

génèrent 63 années d’embargo, la piètre performance d’une économie fonctionnarisée, l’impossibilité de voyager, de contester, le nombre toujours trop élevé de prisonniers d’opinion… calment les ardeurs. En revanche, impossible de ne pas saluer l’unité de la population, sa solidarité, son infernale créativité qui fait que tout problème finit par trouver sa solution. Ne jamais plier devant l’ogre américain devient un pacte militant. Hypothèse : Cuba tient sa potion magique, elle marie un caractère trempé de noblesse espagnole avec la libre exubérance des îles tropicales et les rigueurs du marxisme-léninisme aux vertus fleuries dès la petite école.

Le parfum d’Ava

La Havane mérite alors qu’on brandisse ses mythes. Cap sur l’hôtel Nacional. Sixième étage, companero, chambre 629. Sur la porte figure un écusson « Suite historique ». Juste à côté, un bouquet de fleurs fraîches et une photo avec légende : « Logement de Madame Ava Gardner, actrice étatsunienne ». Dans les années cinquante, Pandora adorait, elle réclamait les fièvres cubaines que la mafia américaine enflammait. Au Nacional, Lucky Luciano réunissait ses capos, les rails circulaient, les liasses volaient sur les tapis verts qu’entouraient des belles prêtes à être dégrafées, tout comme le holster des massifs qui veillaient. Champagne, s’il vous plait ! 

Sur la scène, Sinatra emballait sec. Ava n’en fit qu’une bouchée (ils se sont mariés), Fly me to the moon, avant qu’elle s’entiche d’un torero andalou dont elle mordilla les deux oreilles, puis gagna Paris où l’espérait Françoise Sagan. Désormais, le Nacional accueille le plus beau rituel de La Havane. A l’heure du couchant, s’installer dans le somptueux jardin qui déroule son tapis de verdure devant la maison édifiée en 1930. Cocktail, orchestre, le ciel se couvre d’or, les belles défilent au bras de leur hidalgo, l’Atlantique s’assagit, le palace rejoue sa gloire d’antan, on dirait une bulle à l’écart du temps. Dans l’excellent restaurant de la maison, la pianiste prolonge la magie, Besame mucho.

Le palais des arts

Enfin, rendez-vous à la FAC, la Fabrica de Arte Cubano. Le site révèle le génie de La Havane. Prenez une usine, vraie de vraie, avec murs et cheminée de briques. Le dernier ouvrier a filé depuis une éternité. Des gamins débordant d’imagination ont occupé le site en le décrétant « Tout en un ». Ateliers d’artistes, peintres, sculpteurs, modeuses, graffeurs, salles d’exposition, boîte de nuit, restaurant, scène musicale, cinéma, ballet, bistro… La FAC invente, bouillonne et festoie sans retenue, comme si dans cet îlot de créativité se forgeait l’éveil de La Havane, sa conscience aigüe, ses rêves illimités. Impossible de ne pas y voir une démonstration de liberté.

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