Un village ? Mais non, un hôtel !
En France, une bonne dizaine d’adresses illustrent la transformation osée d’un village déserté en hôtel de charme. Les maisons deviennent chambres, la mairie se fait lobby, la grange abrite le restaurant, les ruelles sont bordées de boutiques amies et sur la place centrale, le bistro affiche une incomparable convivialité. Sélection de rendez-vous au charme made in France.
Et soudain, le village retrouva son animation, redevint pimpant, il reprit vie. Dans toutes nos régions, l’affaire ravit, appelle les éloges, saluant au passage l’implication et la ténacité du nouveau maître des lieux. Il lui en faut. Achat du hameau abandonné, un prix souvent anecdotique, puis réfection des bâtiments et des voies de circulation, aménagements hôteliers et décoration, enfin recrutement d’un chef, d’un directeur avisé, ajouter alors une somme à six zéros. Voilà le prix à payer, l’énergie à consacrer, pour espérer la récompense d’un client enchanté.
Domaine de Rochevilaine, la Bretagne éternelle
L’hôtel occupe toute une presqu’île, la Pointe de Pen Lan à Billiers. Vannes est à une trentaine de kilomètres. A l’origine, il s’agissait d’un village monastique, l’abbaye de Prières, un enclos où des Cisterciens réglaient les affaires du ciel. Curieusement, l’esprit est resté, comme si le recueillement s’était à jamais incrusté dans les pierres du domaine. L’ambiance sera donc paisible, voire méditative, avec une horloge nature que rythment les marées et le murmure de l’Atlantique. Rochevilaine raconte la Bretagne éternelle.
Ce havre de sérénité a été racheté en 1952, puis peu à peu aménagé en résidence à l’abri du monde. Il a vite gagné ses galons de Relais & Châteaux. Une dizaine de bâtisses dont une tour de guet, pas un mur qui ne soit de solide granite gris, des portes monumentales (une du XIIIème siècle !), deux manoirs historiques, des sculptures sans doute un peu ésotériques, des jardins somptueux au bonheur des hortensias comme des agapanthes, forcent le trait. Une trentaine de chambres, l’inévitable chemin des douaniers qui fait le tour du domaine, un véritable spa marin et une table gastronomique complètent l’agrément. A table, le menu propose un homard en cinq services. On dirait que s’égrènent alors les prières des Cisterciens.
Domaine de Murtoli, prendre le maquis en Corse
Pour vivre heureux, vivons cachés. Le Domaine de Murtoli adopte le principe, en mode 5-étoiles. Deux mille hectares de maquis servent d’écrin à cet ensemble exceptionnel de charme et de discrétion : vingt bergeries plus vraies que nature y ont été semées avec tout le confort moderne, embellies par une décoration aussi simple que chic, chacune son bassin-piscine ainsi que sa parfaite intimité.
A deux pas de Sartène (Corse du Sud), bénéficiant de 10 kilomètres de bord de mer alternant rocailles et criques tapissées de sable, cet enclos de bonheur n’est accessible que par la mer ou au bout d’une piste cabossée qui exige le 4X4. Au-delà, le monde reste à la porte. Voici la raison pour laquelle, malgré d’élégants tarifs, Murtoli accueille le gotha mondial, Obama comme Madonna, sans oublier tout ce que la France compte de célébrités, petit et grand écran confondus, musique et politique autour du même menu. On les comprend.
Le service est épatant, il offre chaque repas à domicile pour qui le souhaite. Petit déjeuner, cela va de soi, mais également tablée entre amis ou dîner aux chandelles à partager les yeux dans les yeux. Bref, voici le plaisir d’une bergerie « comme à la maison ». Cela dit, les hôtes ont accès à trois restaurants dont un gastronomique. Tous sont alimentés par la ferme et le potager du domaine, ses légitimes fiertés. Un parcours de golf, un Spa, des sorties en mer, d’autres à cheval complètent à la carte du jour. Les bienheureux peuvent même se contenter d’une promenade au fil des sentiers tracés dans le maquis (une cinquantaine de kilomètres) à l’abri des oliviers, des chênes et des figuiers. A l’heure où le ciel se couvre d’or, les amoureux adorent. Un serveur attentif aura préparé l’apéritif sur la terrasse. Elle aura sans doute envie qu’on l’embrasse.
Crillon-le-Brave, la Provence enchantée
Oui, c’est bien le Ventoux, majestueux, qui s’offre sur écran géant depuis les balcons et les terrasses de Crillon-le-Brave. Le village a été posé ici dès le XIIème siècle sur une élévation provençale chargée de balayer la région, entre Carpentras et Vaison-la-Romaine (Vaucluse). Un jour, ses feux ont pâli. Le silence régna sur les maisons de pierre blonde coiffées de tuiles couleur terracotta, sur l’église sans âge, sur les écuries… Seul le mistral venait encore les caresser.
Et puis, miracle. Un hôtelier au regard un peu plus grand que les normes ordinaires eut la belle idée d’installer ici son établissement. Crillon-le-Brave naquit à nouveau. Seize chambres et dix-huit suites ont été installées dans les anciennes maisons. Les ruelles à nouveau pavées de tomettes roses mènent à l’olivier centenaire, cœur battant de la propriété, la cuisine provençale brille à la table des deux restaurants dont un gastronomique, le Spa, la piscine, les cours de yoga, les vélos électriques et les parties de pétanque ravissent les hôtes, dans un décor de cyprès, de massifs de lavande qu’enchantent les cigales. Soudain, volent les notes d’une cloche légère. C’est celle de l’église de Crillon-le-Brave. Le village vit, il rayonne.
La Coquillade, Lady Gargas
Direction le Luberon, là où Provence rime avec excellence. Le GPS indique très précisément le village de Gargas. Il est resté fameux pour ses mines d’ocre et ses grottes ornées de peintures préhistoriques. Des mains, des bisons, des silhouettes millénaires ajoutent au frisson de la belle.
Juste à côté, sur 42 hectares de vignes (cépage aureto), d’oliveraies et de lavande, est installé La Coquillade. Le hameau-monastère de campagne fondé au XIème siècle par les Cisterciens est devenu hôtel 5-étoiles, affilié Relais & Châteaux. La récompense est méritée tant il impose calme et sérénité. Les soixante-trois chambres occupent les maisons, tout comme les trois restaurants de l’établissement dont un dédié à la cuisine italienne, il fait merveille.
Trois piscines et un Spa de 2 000 m² complètent le plaisir du séjour. Il faut en évoquer un dernier, il est rare. La coquillade abrite un étonnant rendez-vous pour cyclistes. Du pro (machines de champions) au bambin en passant par le vélo électrique et le VTT. La maison propose des itinéraires à la carte au milieu des champs de lavande du Luberon, tout comme des raids à défier le Ventoux (1 909 mètres). Chacun choisit son option et vive la petite reine ! Ensuite, pause et récupération dans les eaux délassantes du Spa. Un massage ?
Château de La Chèvre d’Or, grand chic et grande bleue
Il s’agit bien d’une biquette. Elle prend la pose sur le plus haut des toits du village perché de Eze (Alpes-Maritimes), fière gardienne du piton qui domine la Méditerranée à 400 mètres de hauteur. Vue mer éblouissante sur la baie de Saint-Jean-Cap-Ferrat pour la chèvre parée d’or. Sous ses pattes, un bourg médiéval avec son bouquet de maisonnettes de pierre blanche, entourées d’une cascade de jardins en escaliers. Effet wahou garanti. Quand on imagine que ce fut jadis un village déserté… Les Obama comme Nietzsche auparavant, Bono autant que Walt Disney, Hitchcock, Nicholson ou Cocteau se sont laissés flamber, c’est un signe. Chaque année lors du Festival de Cannes, le générique des quatre restaurants (dont un deux fois étoilé) réunit les étoiles du jour. Ce sera sans doute l’heure de négocier un prochain casting parmi les 15 000 bouteilles qui patientent en cave, avant de piquer une tête nocturne dans la piscine. Les stars adorent ce genre de facétie.
Quant aux quarante-quatre chambres de l’hôtel 5-étoiles, elle se cachent dans les maisons du village. Chacune son style et sa décoration à base de matières chic et de mobilier chiné dans la région. Entre deux paresses à l’abri de ces cocons douillets, filer le long des allées bordées de rosiers, jasmins, bougainvilliers, cyprès et citronniers. Pour savourer, faire la pause sur un banc, histoire d’admirer le panorama grand bleu, ainsi que des sculptures animalières, des chevaux, un éléphant, une girafe, un cerf aux bois altiers. Photo, s’il vous plait ! Sur son toit, la chèvre d’or brille soudain un peu plus fort.
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