Michaël Youn

Taquin, malicieux, potache ou pince-sans-rire, l’humour a mille facettes chez Michaël Youn mais la bienveillance est de mise ; le respect et l’écoute de l’autre aussi.
Rencontre régénérante et joyeuse avec un sacré bosseur.

Enfin voici l’été ! Été studieux ou en lâcher prise ?
Créateur de tentations

MY Michaël Youn J’aurais aimé que ce soit un été en lâcher-prise, (rires) mais malheureusement le Covid est passé par là pour tout le monde donc ce sera un été studieux, même très studieux ! Il ne faut rien lâcher. On est en train de relancer la machine dans l’économie et notre activité n’a pas été épargnée par cette crise donc il est essentiel de se remettre au travail, à fond.

Finalement cela montre chez vous une capacité innée à vous réinventer ?
Créateur de tentations

MY Oui c’est vrai, pourtant au moment où je le faisais ce n’est pas du tout ce à quoi je pensais ! Je me disais plutôt « Tiens, j’ai envie de tourner un film !» « Ah ! ben je vais tourner avec Woody Allen. » Et hop ! Je me mettais en scène en devenant Diane Keaton. « On ne peut pas aller chez le coiffeur ? Tant pis, moi j’y vais » etc… En fait, le personnage que j’ai ainsi créé, en dit long aussi sur mon envie de braver les interdits et d’être dans une forme de désobéissance affichée.

Justement vous qui êtes connu pour votre humour et votre fantaisie, il est évident que vous êtes un travailleur acharné et très exigeant. On dirait que « faire rire » demande encore plus de travail ?
Créateur de tentations

MY Je ne dirais pas que faire rire est plus difficile qu’émouvoir. Mais ce qui est certain c’est qu’échouer en cherchant à amuser le public est plus dur à admettre ! Cela m’est non seulement déjà arrivé mais pire, de nombreuses fois (rires) et c’est vraiment ce qu’on craint. Par exemple si vous allez voir un thriller et que vous n’êtes pas convaincu votre jugement sera plus nuancé que si vous allez voir une comédie qui ne vous fait pas rire. Vous vous direz que les auteurs ne se sont pas donné de la peine et que franchement c’était nul : vous n’avez pas ri ! Rire, c’est plus extérieur, évident, frontal. On va moins puiser les émotions dans le ressenti ou l’introspection propres au spectateur. Donc c’est vrai que l’humour et la comédie exigent à tous les niveaux, dans le scénario, les dialogues, le jeu une grande rigueur et une précision mathématique

Amuser et faire rire c’est aussi rebondir sur des faits d’actualité. Au-delà de la notion dramatique vécue par tous, cette période très compliquée que traversons provoque des situations parfois étonnantes Cela vous inspire-t-il ?
Créateur de tentations

MY Absolument pas ! Pourtant je dois être l’un des rares en France qui a participé à un projet qui était lié au Covid en tournant dans un film de Romuald Boulanger (diffusé sur Amazon Prime) « Connectés » ou l’histoire d’un apéro zoom qui dégénère pendant le confinement. Mais moi, en tant qu’auteur et citoyen ça ne m’a pas inspiré du tout. D’abord parce que c’est trop récent, voir pas terminé ; que c’est triste avec déjà 4 millions de morts dans le monde. Alors parfois oui ces moments dramatiques comme dans le cas de la seconde guerre mondiale peuvent malgré tout inspirer des comédies, on le voit notamment avec La Grande Vadrouille. En revanche, là je crois que prendre du recul va mettre du temps. Surtout qu’on ne sait pas vraiment si cette période est derrière nous… Donc pour l’instant on va laisser la gestion du covid aux médecins et faire tout pour ne pas que cela revienne !

La situation a aussi également et par conséquent, contraint et modifié l’accès à la culture : pensez-vous que le regard du public sur le cinéma a changé ? Et si tel est le cas, croyez-vous que cela soit de manière durable ?
Créateur de tentations

MY Clairement là et pour l’instant, les spectateurs ont du mal à revenir dans les salles. Pour le reste, si seulement j’étais devin ! Mais une chose est sûre, il me semble évident qu’à présent, les talents devront s’exprimer à 360°, tous supports confondus. Présents partout, tout le temps… Emilie Rajatosvki par exemple, a récemment répondu à une question sur la vie privée par ceci : « private life that doesn’t exist anymore » (« la vie privée n’existe plus du tout ») Je trouve cela très triste et j’espère que non, mais oui, voilà, il va falloir nous adapter à ce monde qui change. Comme dans le voyage, nous évoluons dans des secteurs où les métiers sont en mutation tandis que le monde est en crise. Nous devons être extrêmement flexibles et ne pas avoir trop de crédits sur le dos ! En tout cas, l’image qu’on pouvait avoir de talents qui gagnent hyper bien leur vie en ne travaillant que de temps en temps est complètement obsolète ! Il y a eu des âges d’or certes de ce genre dans le cinéma, la musique et je sais de quoi je parle parce que j’en ai profité. Quand on a sorti ce tube Kouroukoukou stach stach imaginé en à peine une heure avec les Bratisla Boys, on en a vendu 2,5 millions d’exemplaires. Un truc complètement fou et, oui, j’ai connu ça. Mais là je crois que c’est terminé ! En plus maintenant ceux qui en profitent ne sont plus clairement identifiés ou personnifiés comme l’étaient les producteurs ou les maisons de disques nationaux. Non ceux qui s’enrichissent ce sont les plateformes, les grands groupes mondiaux, à l’égide impersonnelle type GAFAM and co.

À présent, mettons le cap sur les vacances malgré tout ? Si vous prenez la clef des champs, où partez-vous ?
Créateur de tentations

MY J’aime beaucoup les paysages grandioses et l’ambiance style « aventurier » mais avec mon confort ! (rires) En vrai je mets le cap sur l’île de Kawi dans l’archipel des îles Hawaï. C’est un endroit que j’adore sur terre car c’est à la fois les États-Unis mais ils sont très loin des vicissitudes des autres états. Certes les plages sont dangereuses, ce n’est pas forcément pour aller barboter dans l’eau – on n’est pas aux Maldives ou aux Seychelles – mais c’est l’ambiance. Ils ont là-bas une forme de « dolce vita » locale qui est assez enivrante et décalée. Il y a un côté fun, folk, un peu Crosby, Stills, Nash & Young. On boit de la bière en sandales, on prend des immenses 4X4 pour aller surfer… Dépaysement assuré, hors du temps.

Sinon j’ai un ami qui dit souvent « si vous me cherchez et que j’ai disparu, allez en Italie » et je suis d’accord avec lui. Car l’Italie est mon pays préféré au monde, d’ailleurs on dit que les Italiens sont des Français de bonne humeur ! C’est un pays qui par endroits est resté un peu bloqué dans les années 60. Les Italiens ont un regard pétillant sur la vie et pour le coup c’est la vraie dolce vita ; je peux y passer des semaines et des semaines !