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Croisières :le bleu se pare de vert

D’accord, « le monde est bleu comme une orange ». Mais convenons que mer et océans qui en couvrent plus des deux-tiers sont d’abord altérés par les humains qui vivent sur la terre ferme. En revanche, les vertus de l’espace maritime sont veillées par à celles et ceux qui en font leur cadre de vie. Au premier rang, les compagnies de croisières, sans cesse plus soucieuses de limiter l’impact écologique de leurs activités. Ou comment la vague verte magnifie le grand bleu.

Mobilisation générale, tout le monde sur le pont ! Cap imposé : assurer la durabilité des activités maritimes. Restaurer leur image aussi. Sur ce registre, plusieurs manières sont mises en avant par les intéressés. Ils agissent à trois niveaux : la gouvernance de l’entreprise, le fonctionnement des navires et la gestion des excursions.

Une entreprise consciente

« Une fois par mois, notre Comité de développement durable réunit une quinzaine de responsables. Ils décident des mesures à venir en fonction de leur impact sur l’environnement », détaille Wassim Daoud, responsable du développement durable et de la responsabilité sociétale chez Ponant. Il ajoute : « Nous sommes la seule compagnie de croisières dont les statuts mentionnent le développement durable comme objectif de l’entreprise ». Illustration avec les constantes études d’impact qui touchent aussi bien le choix des cosmétiques déposés en cabine, que la présence d’excursionnistes devant une colonie de manchots, l’escale parmi les tortues d’Aldabra aux Seychelles, ou le choix du carburant. Actuellement le Low sulphur marine gas oil (LSMGO) retenu affiche un taux de soufre à 0,47%, on ne fait pas mieux en mer. Bravo, le pavillon français s’impose comme modèle de responsabilité.

Le GNL entre en scène

Pour ce qui concerne les paquebots et leur fonctionnement, le tableau vertueux est plus largement partagé. Les bureaux Recherche et Développement des chantiers navals comme ceux des motoristes, travaillent d’arrache-pied pour imaginer les formules les plus « propres ». La demande, compagnies et passagers réunis sous le même pavillon, est impérative. L’argument du tarif au raz des vagues pour embarquer sur des unités crachant leur vilain panache noir, ne joue plus, heureux effet de la prise de conscience des vacanciers.

Alors, outre le LSMGO, le gaz naturel liquide (GNL) entre en scène sous l’égide de Ponant (Commandant Charcot), d’Aida (Aidanova), de Costa (Smeralda) ou de MSC qui vient de passer commande de deux unités aux chantiers de Saint-Nazaire, équipées de cette technologie qui n’émet aucun soufre. Alternative choisie, entre autres, par Silversea, équiper ses bateaux d’un système qui module le fonctionnement des machines en fonction de la demande d’énergie à bord. Des économies certes, en perspectives, mais aussi de moindres émissions de CO².

Gestion verte du bord

En attendant que les utopies d’aujourd’hui, propulsion avec une voile d’appoint, motorisation électrique, énergie solaire, etc., deviennent les réalités de demain, la plupart des compagnies embarquent des systèmes basse consommation pour l’eau et l’électricité. De la salle de bains à celle des lessives, tous les paquebots s’y mettent. Sans parler des unités de recyclage des eaux de douche, des détritus, voire des cosmétiques posés en cabine, ainsi que l’incinération des poubelles à bord et non plus à l’escale. Seabourn, Crystal Cruises, Cunard (l’incinérateur du Queen Mary 2 a une hauteur de quatre ponts !), Holland America, NCL, Ponant, Quark Expeditions ou Regent, naviguent avec les équipements requis. Plusieurs d’entre elles ajoutent des pots catalytiques qui évitent les rejets de soufre et d’azote (exemple, Ponant qui mit à cette norme Paul Gauguin juste après son rachat). Elles optent aussi pour le branchement électrique à quai qui supprime toute émission. A condition quand même que le port dispose des équipements capables d’alimenter un géant des mers et ses 5 000 passagers. La plupart des grandes escales offrent cette opportunité.

Sensibiliser les passagers

Militons pour le vert, à leur tour, les passagers sont conviés à s’engager. Fini les bouteilles, les pailles et autres gobelets en plastique. L’heure est au recyclable à bord. Tout comme à la possibilité de ne pas exiger que ses draps soient changés au quotidien. Silversea comme d’autres ajoutent la demande de veiller à la fermeture des vérandas afin de ne pas gaspiller l’air conditionné.

En prime, les croisiéristes sont souvent conviés à une conférence sur la protection de l’environnement durant leur voyage. Elle prend tout son sens lorsqu’ils croisent dans des régions sensibles comme l’Arctique, l’Antarctique, l’Alaska ou des sites dont on sait la fragilité, Venise, la Grande Barrière de corail, les Galapagos, etc. Des partenariats avec l’Unesco, National Geographic ou les plus grandes entités de protection de la nature permettent d’accueillir à bord des spécialistes dont les conférences alimentent la responsabilité des visiteurs. Soulignons ainsi le partenariat entre Quark Expeditions, la compagnie canadienne qui débarque en France, et l’Unesco. Au terme de cet accord, les passagers de Ocean Adventurer accèdent à deux sites ultra-protégés du Groenland, incluant la rencontre avec une famille de la banquise. Prière d’écouter, de regarder, mais ne pas déranger.

Enfin, Cunard, d’autres aussi, veille à ne s’approvisionner en nourriture, légumes, fruits, viandes et poissons, qu’auprès des filières agricoles et piscicoles responsables.

Serpents et arbres sacrés

En matière d’excursions, il convient de distinguer. On ne traite pas une escale aux quais de Barcelone ou de Vancouver comme une visite en zodiac sur les banquises du grand Sud. La seconde est évidemment l’objet des plus grandes attentions. Les formules « expédition » si prisées des croisiéristes réunissent au maximum une poignée d’aventuriers dûment briefés sur l’interdiction totale de déplacer un nid, d’arracher une feuille ou de chiper un caillou. Et ça marche  ! « Nos passagers reçoivent toutes les explications sur l’excursion à venir, liste des interdits comprise. Avant de poser le pied à terre, nous leur demandons de signer une charte de bon comportement », précise Wassim Daoud qui révèle au passage que sa compagnie possède un bateau, Tataina, totalement dédié aux repérages, grâce auxquels sont validées -ou pas- les futures sorties. Parfois, l’équation se révèle en effet bien plus complexe qu’imaginé.

Aux Bijagos par exemple, il faut veiller à la nature, évidemment, serpents compris, mais aussi aux arbres sacrés, aux sites interdits aux non-initiés… Pas touche ! « Nous défrichons sans cesse de nouvelles régions, nous savons notre responsabilité et nous l’assumons avec des normes très strictes. Être leader, c’est d’abord montrer l’exemple », conclut l’expert Daoud. On hésite à écrire « le sage de Ponant ».

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